09/10/99

Obstacle à la réalisation de l'égalité.Archive.COE

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Quand sera-t-il pris enfin acte simplement de ce que les violences féminicides sont l'obstacle incontournable à la réalisation de l'égalité entre les femmes et les hommes. L'inverse n'était absolument pas vrai et ne s'agissant nullement de mettre en concurrence victimaire...  Interdisons d'un seul mot générique ces féminicides, il est bien temps ces années de commissions, d'enquêtes, de recommandations, résolutions ?

Séminaire 8/9 octobre 1999 au Conseil de l'Europe à Strasbourg - Table des matières"Les hommes et la violence à l'égard des femmes
RECOMMANDATIONS
La violence à l’égard des femmes est l’un des principaux obstacles à la réalisation de l’égalité entre les femmes et les hommes. Le phénomène trouve ses racines dans la structure même des sociétés européennes, fondées sur des valeurs et principes patriarcaux. Bien que la violence masculine puisse être dirigée aussi contre d’autres hommes et que l’on signale des incidents provoqués par des femmes violentes, la très grande majorité des victimes de violence dans les Etats membres du Conseil de l’Europe sont des femmes et des enfants.

La plupart des sociétés européennes continuent de tolérer la violence à l’égard des femmes, jugée acceptable selon la tradition. Elles continuent, directement ou indirectement, à en imputer la faute aux victimes en donnant à entendre que celles-ci n’auraient pas été agressées si elles avaient ou n’avaient pas adopté tel ou tel comportement. On excuse souvent les hommes violents en disant qu’ils sont soumis à la tension d’un surcroît de travail ou du chômage, sous l’influence de l’alcool ou de la drogue, malades, etc.

Les femmes subissent des violences qui leur causent des souffrances ou des torts physiques, sexuels ou psychologiques, et ce dans leur vie privée comme dans leur vie publique. Cette violence peut revêtir différentes formes: agression sexuelle, violence dans le cadre de la famille ou du
couple, intimidation et harcèlement sexuels (dans le cadre du système éducatif, au travail, dans des institutions ou partout ailleurs), négation des droits en matière de procréation, mutilation génitale, traite d’êtres humains aux fins d’exploitation sexuelle et tourisme sexuel, viol ou agression dans une situation de conflit (armé), meurtre «d’honneur» et mariage forcé.

Conscients de ce qui précède, les participant(e)s au séminaire organisé par le Conseil de l’Europe à Strasbourg les 7 et 8 octobre 1999 sur le thème «Les hommes et la violence à l’égard des femmes» adoptent d’un commun accord les recommandations suivantes.
Recommandations aux Etats membres du Conseil de l’Europe
Le phénomène de la violence à l’égard des femmes étant encore nié, la recherche et, en particulier, les enquêtes sont essentielles, car elles peuvent servir à éclairer les décideurs sur l’ampleur réelle de cette violence. Pour mieux se rendre compte de l’incidence du phénomène en question, il faut se servir d’instruments normalisés afin d’obtenir des données valables, fiables et comparables, ainsi que des résultats représentatifs de la réalité. Cet effort est à poursuivre aux niveaux local, régional, national et international, et dans cette perspective, les gouvernements devraient:

 - Encourager et soutenir les projets d’enquête et de recherche nationaux et internationaux sur les différentes formes de violence à l’égard des femmes, en tenant compte des paramètres suivants, dont l’ignorance risquerait d’altérer les résultats desdits projets:

 - la perspective de l’égalité entre les sexes, y compris en ce qui concerne l’élément de conflit entre les sexes, présent dans toutes les sociétés européennes;

 - la variabilité des significations et de la perception des notions dans différents contextes que déterminent divers facteurs (par exemple, les disparités de classe
sociale ou d’origine régionale, culturelle et linguistique): plusieurs groupes de personnes peuvent ne pas comprendre la même notion - dont la violence - de manière identique;

 - la stigmatisation de certaines notions, telle que le viol, encouragée notamment par les moyens de communication de masse;

 - l’évolution et la transformation des valeurs culturelles;

 - les changements sociétaux, en particulier lorsque apparaît de l’instabilité (due à des causes socio-économiques ou à un conflit); même si la cause de l’instabilité disparaît, le niveau de la violence ne diminue pas;

 - encourager la normalisation des méthodologies de recherche en se servant, entre autres, des éléments suivants:

 - un échantillon représentatif de la population (1000 répondants au minimum);

 - une échelle comportant la description extrêmement détaillée des actes de violence;

 - les informations fournies par des femmes battues ou victimes de tout autre violence (également en vue d’établir des questionnaires);

 - la formation des enquêteurs/trices et des chercheurs/euses, qui doit comporter une information sur la manière de prendre en compte les différences culturelles, ethniques, sociales et économiques, ainsi que sur celle d’accéder à des groupes isolés ou marginalisés;

 - les précautions visant à prévenir les dangers que les répondants pourraient courir à la suite des enquêtes ou études;

 - pour les recherches conduites au niveau européen, le recours à des linguistes professionnels pour éviter les problèmes de traduction;

 - encourager et soutenir les recherches nationales et internationales sur les points suivants:

 - ce qui empêche quelqu’un de devenir violent;

 - les moyens d’aller vers les hommes violents et de les intégrer dans des programmes spéciaux;

 - la polarisation dominante sur la construction de l’identité sexuelle, en vue de promouvoir une perception plus ouverte de la féminité et de la masculinité;

 - dans quelle mesure et de quelle manière l’instabilité sociale et la transformation de la société agissent sur les relations entre les sexes et sur la violence à l’égard des femmes;

 - les incidences que la violence domestique a sur les enfants et adolescents et la manière dont elle affecte leur socialisation, ainsi que leur future insertion dans le monde du travail et les relations qu’ils ont avec leurs égaux et partenaires;

 - les moyens de prévenir la violence et les abus exercés sur les personnes âgées;

 - les coûts économiques de la violence;

 - améliorer les interactions entre la communauté scientifique, les ONG travaillant dans ce domaine, les décideurs politiques et les législateurs, afin de concevoir des actions coordonnées contre la violence;

 - encourager la diffusion de toutes informations utiles (résultats d’études et de recherches, statistiques, etc.) sur la violence à tous niveaux à l’égard des femmes de tous âges;

 - faire en sorte que les institutions chargées de prendre en charge la violence masculine signifient clairement aux hommes que leur comportement est inacceptable et mettent en place et approfondissent des stratégies pour les récidivistes, y compris une approche pluri-institutionnelle;

 - à l’aide de la stratégie de l’approche intégrée de l’égalité entre les sexes, faire participer à l’élaboration d’une politique en la matière tous les acteurs normalement concernés - même s’ils ne travaillent pas en ce moment sur la question -, afin de lutter contre la violence à l’égard des femmes;

 - renforcer les législations et mesures nationales visant à lutter contre la violence à l’égard des femmes, également en instituant des démarches novatrices fondées sur les expériences conduites dans d’autres pays européens, car la mise en commun des enseignements recueillis en la matière est essentielle pour progresser;

 - adopter ou renforcer les mesures de protection sociale, de sorte que les dommages causés par des actes violents aux femmes et aux enfants soient couverts par les régimes de protection sociale;

 - promouvoir la formation des personnes travaillant avec des jeunes et celle des professionnels de santé, afin d’une part d’identifier les enfants et adolescents qui grandissent dans des foyers où règne la violence, et d’autre part de prendre les mesures nécessaires pour les aider et les soutenir;

 - assurer la formation du personnel médical afin qu’il puisse identifier les victimes de violence;

 - promouvoir la participation des femmes en politique et à la prise de décisions: il est important d’accroître le nombre de femmes en politique afin qu’un nombre plus élevé de mesures pour combattre la violence soit adopté;

 - promouvoir l’éducation aux droits de l’homme, et en particulier l’éducation à l’égalité entre les femmes et les hommes, dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe, notamment ceux où l’on remarque de l’instabilité sociale;

 - susciter une participation active de la police en matière de lutte contre la violence à l’égard des femmes;

 - promouvoir la formation du personnel judiciaire en matière de lutte contre la violence à l’égard des femmes;

 - promouvoir la recherche et prendre toutes les mesures possibles pour prévenir le développement d’une dichotomie et de l’inégalité entre femmes et hommes, ainsi que l’agressivité masculine dans l’armée et dans tous contextes militaires (particulièrement pendant le service militaire), y compris pendant les conflits armés;

 - condamner toutes les formes de violences à l’égard des femmes et des enfants en situation de conflit;

 - condamner les viols systématiques, l’esclavage sexuel, les grossesses forcées des femmes et des jeunes filles ainsi que toutes formes de violence à l’égard des femmes et des enfants qui tendent à être utilisées comme arme de guerre, comme cela est apparu dans les conflits récents;

 - promouvoir, dans les régions qui ont été affectées par des conflits, un débat public ainsi qu’une diffusion de l’information concernant les abus subis par les femmes et les enfants, afin de prévenir la répétition de la violence.
 - Recommandations au Conseil de l’Europe

 -
Les participant(e)s soulignent que la communauté internationale - et en particulier les organisations internationales telles que le Conseil de l’Europe - ont un rôle éthique capital à jouer dans la promotion de la tolérance zéro vis-à-vis de la violence à l’égard des femmes. En condamnant cette violence, elles peuvent transmettre un message politique important aux gouvernements et aux décideurs.

 - Les participant(e)s notent que les travaux incessants du Conseil de l’Europe, et en particulier de son Comité directeur pour l’égalité entre les femmes et les hommes (CDEG), visant à lutter contre la violence à l’égard des femmes, ont beaucoup contribué à sensibiliser les esprits à ce problème. Le Plan d’action publié en 1997 a été perçu comme une plate-forme efficace pour l’élaboration de mesures au niveau national.

 - Le Conseil de l’Europe doit continuer à jouer un rôle essentiel dans la lutte contre la violence. La nécessité d’actions internationales à entreprendre aux niveaux des législateurs, des décideurs politiques et des chercheurs/euses en vue d’étendre la coopération internationale, peut servir de base à l’action future de l’Organisation.
 - Les activités suivantes pourraient être conduites au sein du Conseil de l’Europe ou avec son assistance:


 -
poursuivre et achever, aussi vite que possible, l’élaboration du projet de recommandation relative à la protection des femmes et des jeunes filles contre la violence, qui est en préparation sous l’égide du Comité directeur pour l’égalité entre les femmes et les hommes (CDEG); une fois adoptée, la recommandation pourra servir de référence pour la préparation de lignes directrices nationales dirigées contre la violence;

 - réaliser le plus tôt possible une étude sur l’état des législations des Etats membres concernant la violence à l’égard des femmes; en assurer la traduction et la diffusion dans les Etats membres;

 - organiser - le cas échéant en coopération avec d’autres organisations et organismes internationaux compétents - des réunions périodiques auxquelles participeraient en particulier des décideurs/euses, des chercheurs/euses, des praticien(ne)s et des représentant(e)s de la police pour déterminer l’état actuel de la recherche et de la pratique en la matière et échanger des informations à ce sujet;

 - établir des rapports par pays sur la base des recherches effectuées et des informations réunies au niveau national en ce qui concerne la violence à l’égard des femmes et les mesures prises pour la combattre;

 - à la suite des récents conflits en Europe du Sud-Est, prendre part aux efforts entrepris sur le plan européen pour favoriser la paix et la stabilité dans les pays de la région en organisant des activités ayant pour but de combattre la violence à l’égard des femmes sous toutes ses formes;

 - promouvoir la recherche sur l’évolution de la violence à l’égard des femmes, sous ses différentes formes, pendant et après les conflits qui ont affecté récemment l’Europe du Sud-Est, y compris l’accroissement de la violence au sein de la famille.

Table des matières du séminaire du COE - 7-8 octobre 1999 Les hommes et la violence à l'égard des femmes http://www.eurowrc.org/13.institutions/3.coe/coe_european_council.htm